Cela fait désormais presque un an et demi que je suis au Japon. J’ai pu visiter avec un peu plus de calme le pays pendant mes vacances d’été, où j’ai été accueilli par deux confrères âgés, d’abord dans l’Hokkaido, l’île la plus au nord parmi les quatre principales qui composent le pays, ensuite dans la campagne japonaise à une centaine de kilomètres à nord de Tokyo. J’ai découvert, dans les deux cas, un autre Japon, très différent de celui des grandes villes comme Tokyo et Nagoya. « Wakai shinpusama ! » (« jeune prêtre ») était l’expression avec laquelle j’étais le plus souvent accueilli dans l’Hokkaido par les gens, qui n’ont pas vu passer beaucoup de missionnaires dans les derniers temps.
En septembre, il était temps de retourner à Nagoya pour recommencer mes cours de langue, qui ont duré jusqu’en décembre, avec une belle semaine d’absence excusée à la fin de novembre pour rejoindre mes confrères MEP à Taïwan pour une session de formation. Cela a été aussi et surtout l’occasion d’en connaître un certain nombre que je n’avais jamais croisé.
L’étude de la langue commence à donner ses fruits, je suis à peu près à l’aise dans une conversation informelle, même s’il me manque encore beaucoup de vocabulaire. Étudier une langue difficile est un peu la première épreuve d’amour à laquelle tout missionnaire MEP débarquant dans un nouveau pays doit faire face. On démarre comblé d’enthousiasme et d’adrénaline, on expérimente la frustration de celui qui voudrait parler aux gens et qui, au contraire, est relégué dans son mutisme, on se sent souvent découragé. Ensuite, peu à peu, si on fait mémoire de la raison pour laquelle on est là et on demande à Dieu la grâce de rester fidèle, les résultats arrivent. En tout cas, la marche est encore très longue. C’est justement aussi pour favoriser cette marche que le prochain semestre, en accord avec mes supérieurs, je vais essayer une « route nouvelle ». J’ai demandé à l’institution universitaire qui m’accueille à Nagoya de commencer un doctorat de recherche en philosophie sur Nishida Kitaro, un philosophe japonais animé par une forte quête religieuse.
Les missionnaires ici deviennent de plus en plus conscients que pour rencontrer l’ « homme ordinaire » japonais on ne peut plus se limiter à rester en paroisse, il faut avoir une exposition à la société japonaise. Tisser des relations profondes avec les Japonais hors d’un contexte (professionnel, scolaire, académique) demeure très difficile.
On verra si j’arrive à passer l’examen en japonais, qui s’annonce difficile, je vous demande de prier pour moi.
Sinon, après une brève visite à Kyoto pour rencontrer un ami, j’ai célébré Noël avec la petite mais fervente communauté des francophones de Tokyo. Dans l’attente d’un possible retour à Nagoya, je profite du silence et des rythmes plus relaxés à la maison MEP de Tokyo, qui ne compte désormais plus qu’un habitant (l’aumônier des francophones) qui y vit de manière stable.
Le dimanche, je vais concélébrer en langue japonaise à l’église de Tsukiji, ancienne cathédrale de Tokyo, où, au terme de la messe, des paroissiens très patients m’aident à faire de la conversation devant une belle tasse de café.
Cet été, il est prévu que mes parents et ma sœur me rendent visite ici au Japon. Dans un an et demi, je devrai être de retour en France pour les trois mois de mon premier congé.
Je vous pense toujours et je vous demande de me porter dans vos prières.
Amicalement dans le Christ.