Jésus fait « bon accueil aux pécheurs, il mange avec eux ». Pourquoi le Christ agit-il ainsi ? Est-ce pour signifier que le péché n’a pas d’importance pour lui ? Est-ce pour montrer qu’il est indifférent à ses yeux d’être juste ou pécheur ? Non, évidemment. Et la longue préparation du peuple élu dans l’Ancien Testament permet de comprendre à quel point le Seigneur a en horreur le péché parce qu’il abîme son image en nous et contrarie le dessein de vraie joie qu’il a pour nous.
Ce que le Christ nous apprend aujourd’hui, c’est à quel point notre conversion est précieuse à ses yeux et source de joie pour son cœur. « Il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion ». (Lc 15,7) Cette joie de Dieu est manifestée dans l’évangile de ce dimanche par l’attitude du père qui fait tuer le veau gras et festoie. Il faut bien se réjouir, car le fils « était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé ». En constatant notre conversion, Dieu ne voit plus en nous un ancien pécheur, mais un enfant qui revient à la maison.
Le péché, non seulement nous éloigne de Dieu, mais de manière plus grave, nous fait croire que nous ne sommes plus dignes de l’amour de Dieu. C’est l’expérience de l’enfant prodigue. Il s’est éloigné de son père, et l’expérience de sa misère – quoi de plus misérable pour un juif que de garder des porcs, animal impur – l’amène au constat qu’il n’est plus digne d’être appelé fils. Mais si le fils pense ainsi, le père, lui, n’a jamais cessé de voir dans cet enfant prodigue son fils bien aimé de toujours.
La conversion, qui passe par l’acceptation de notre péché, nous permet d’expérimenter à nouveau l’amour sans condition de Dieu qui nous rétablit dans notre dignité filiale. Ce qui est abimé par notre péché, Dieu en fait l’objet de sa miséricorde. Aller manger à la table des pécheurs, ce n’est pas pour le Christ les conforter dans leur péché, mais les appeler de manière pressante à la conversion. Car dans le pécheur, Jésus ne voit pas l’homme perdu, mais il voit le converti potentiel. Sous l’angle de la miséricorde, le péché peut nous remettre en route vers le Père.