Enquête
La Conférence des évêques de France a présenté, jeudi 18 février, les résultats d’un questionnaire portant sur la manière dont les étudiants catholiques vivent la crise sanitaire. Une attention qui fait écho aux nombreuses initiatives locales pour soutenir les jeunes et maintenir un lien social au cœur de cette période éprouvante.
Une respiration dans le quotidien souvent étouffant de la crise sanitaire. Dimanche 14 février, Thérèse Diome a goûté à la chaleur d’un repas dominical. L’étudiante sénégalaise de 25 ans était invitée à déjeuner chez une famille marseillaise. « Au-delà du fait de voir du monde, c’est un plaisir de partager un moment familial et convivial », soutient la jeune femme en Master de sciences à l’Université Saint-Jérôme, à Marseille, coupée de sa famille en raison de la pandémie.
Cette rencontre s’inscrit dans le cadre de l’initiative, baptisée « Tous Anti Déprime », qui vient de débuter. Elle est née sous l’impulsion de Myriam Franc, catholique marseillaise, soutenue par le père Martin Durin, responsable de la Pastorale des étudiants et jeunes professionnels du diocèse.
Cette mère de famille voulait à tout prix « faire quelque chose » à destination des étudiants qui souffrent particulièrement de la crise sanitaire. Elle s’est tournée vers le prêtre qui a mobilisé ses réseaux pour relayer l’initiative. Très préoccupée par la solitude des jeunes, Myriam, accompagnée de sa fille, Élise, 20 ans, mettent en relation des familles volontaires et des étudiants le temps d’un repas ou d’une balade dans la cité phocéenne.
Le message de « sollicitude de l’Église » envers les étudiants
L’altération du lien social des étudiants, souvent contraints de suivre leurs cours à distance, est également une préoccupation pour le père Aldric de Bizemont, curé de la paroisse Saint-François de Sales, dans le 17e arrondissement de Paris. Il a ainsi mis à disposition des étudiants des salles d’études au sein de la maison Daubigny, qui dépend de la paroisse. Le prêtre indique que les jeunes – une vingtaine aujourd’hui – peuvent y bénéficier « de bonnes conditions de travail, tout en ayant de la sociabilité pendant les pauses, dans le respect des gestes barrières ». « C’est essentiel, nous ne travaillons pas en huis clos », insiste le père Aldric de Bizemont, qui se félicite du succès du « bouche-à-oreille ». « Cet espace est une chance, il faut en faire profiter le plus grand nombre. »
Mais, cette attention concerne toute l’Église. La Conférence des Évêques de France a ainsi publié, jeudi 18 février, les résultats d’une consultation nationale portant sur la manière dont les étudiants catholiques vivaient la crise sanitaire. En outre, ces derniers mois, plusieurs initiatives locales ont vu le jour à destination du monde étudiant.
Il n’est toutefois pas aisé de parvenir à toucher le plus grand nombre car comme le souligne le père Martin Durin, il est difficile pour les jeunes en souffrance de demander de l’aide. Pour le prêtre marseillais, « les personnes les plus vulnérables sont celles sans famille, notamment les étudiants étrangers ». Selon Myriam Franc, les jeunes qui fréquentent les aumôneries peuvent être un relais auprès de ceux qui ne penseraient pas à s’orienter vers l’Église.
Déculpabiliser les jeunes
À Paris, la maison Daubigny offre un soutien et un moyen de lutter contre la solitude et l’isolement pour certains jeunes qui n’ont pas de liens avec la paroisse. « Les étudiants se retrouvent, c’est très réconfortant pour eux, témoigne le père Aldric de Bizemont. Surtout, ils déculpabilisent car ils comprennent qu’ils ne sont pas tout seuls dans cette épreuve. Ils partagent leur quotidien et prennent conscience que leur mal-être n’est pas une question de faiblesse. »
Ces initiatives locales tentent de répondre à une urgence de plus en plus criante. Selon diverses enquêtes, une part significative des 15-30 ans se considère appartenir à une « génération sacrifiée ». Le frère dominicain Jean-Baptiste Rendu, aumônier du parcours Even, fait une proposition de formation et d’approfondissement de la foi pour les 18-30 ans, remarque que la « chape de plomb » sous laquelle vivent les jeunes est devenue trop lourde : « On leur fait peser notre angoisse, notre peur du monde ou de la mort alors que c’est un âge où ils ont la vie devant eux. »
Thérèse Thibon, le 18/02/2021